Entraînement au seuil : est-ce le graal ?

Comment calculer son seuil et l’intégrer à l’entraînement ? Quels sont les avantages et les limites de cette intensité de travail ?

« Le seuil, y’a que ça de vrai » entend-t-on régulièrement dans les discussions de coureurs. Mais qu’est-ce que cela veut dire exactement ? Comment calculer ce seuil et l’intégrer à l’entraînement ? Quels sont les avantages et les limites de cette intensité de travail ? Réponses.

La méthode d’entrainement du seuil est orientée sur le seuil anaérobie. C’est l’intensité maximale qu’un athlète peut maintenir de manière stable pendant une durée comprise en 30 min et 1h suivant les niveaux. Le plus souvent, le seuil se situe entre une allure 10 km et une allure semi-marathon.

Seuils aérobie et anaérobie : quelle différence ?

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Avant toute chose, il faut distinguer le seuil aérobie du seuil anaérobie. Le seuil aérobie (ou euil ventilatoire 1) correspond à l’intensité minimale à partir de laquelle l’organisme commence à produire de l’énergie principalement par la voie aérobie, c’est-à-dire en utilisant l’oxygène pour métaboliser les glucides et les lipides.

Seuil 1 : 60 à 70 % de la V02 max

Ce seuil 1 se situe autour de 60 à 70 % de la V02 max. Cela correspond à une intensité modérée que l’on utilise en endurance fondamentale ou en récupération active. L’effort peut être maintenu très longtemps sans dérive physiologique importante. Le lactate sanguin reste stable, généralement proche de 2mmol/L.

Seuil 2 : 80 et 90% de la VO2max

Le seuil anaérobie (ou seuil ventilatoire 2) correspond à l’intensité au-delà de laquelle le lactate commence à s’accumuler rapidement dans le sang car la production du lactate dépasse la capacité d’élimination. Il est situé généralement entre 80 et 90% de la VO2max. Le lactate sanguin dépasse 4mmol/L.

A partir de ce seuil ci, le métabolisme anaérobie lactique devient prioritaire. L’effort devient difficilement soutenable sur la durée.

Intérêts de l’entraînement au seuil

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Au niveau physiologique, cette méthode permet d’améliorer la capacité à « tamponner » le lactate. Le lactate aide alors à neutraliser l’acidité du pH musculaire et permettre aux muscles de fonctionner plus longtemps à des niveaux d’intensité élevés.

Cela développe aussi l’endurance spécifique et la puissance aérobie. Enfin, cela réduit la fatigue à une intensité sub-maximale.

Au niveau mental, l’entrainement au seuil va permettre de mieux tolérer la notion d’inconfort et de mieux gérer son allure en compétition.

En termes de performance, cela se traduit par une amélioration de course à une perception soutenable ainsi qu’un retardement de l’apparition de la fatigue en compétition.

Quelle allure pour courir au « seuil » ?

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Généralement, la zone d’allure est comprise entre 80 et 85% de la VMA soit environ 85 à 90% de la FCmax. En termes de ressenti d’effort, l’athlète doit se situer autour de 6/7 sur une échelle de 1 à 10 (RPE).

C’est une zone où l’on court rapidement mais sans exploser. Le coureur est concentré, il respire, n’est pas à bout de souffle mais ne peut pas parler en phrases complètes.

Comment mesurer le seuil ?

  • En laboratoire. On fait passer un test sur tapis avec des paliers progressifs (ex : 3’) et à la fin de chaque palier, on mesure la lactatémie (taux de lactate) capillaire au moyen d’une piqure au niveau du doigt.
  • Sur le terrain. On fait passer un test progressif sur piste avec enregistrement de la FC (test de Conconi). Le seuil anaérobie est identifié grâce à la cassure de la linéarité entre la vitesse et la fréquence cardiaque.
  • Au niveau du ressenti d’effort (RPE) où l’athlète doit se situer autour de 6-7 sur une échelle de 10.

Intégrer le seuil dans sa planification 

. Consacrez-y 1 à 2 séances au maximum par semaine, suivant votre niveau et votre objectif. Il convient de placer ces séances au seuil assez loin de votre objectif majeur, en tout cas, c’est à éviter le dernier mois d’une préparation.

Veillez aussi à placer le lendemain un jour de repos ou une sortie en endurance et non un travail spécifique. Attention aussi à la zone travaillée, qui n’est souvent pas la bonne. L’erreur fréquente c’est que le coureur maintient une allure trop rapide et amène donc un travail non ciblé correctement.

Gardez à l’esprit que ces séances sont intéressantes si elles sont mises en place dans un plan d’entrainement structuré et adapté à  votre niveau. En effet, il y a plus de risques de blessures que de bienfaits à vouloir reproduire la séance d’un athlète professionnel. Les contraintes entre lui et vous ne sont pas les mêmes (expérience, niveau, récupération, sommeil, alimentation…).

4 séances au seuil à tester

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  • En continu : 30’ échauffement + 20’ au seuil + 10’ retour au calme
  • En intervalles longs : 30’ échauffement + 3 x 8’ au seuil avec récup : 2’  + 10’ retour au calme
  • En combiné : 30’ échauffement + 2 x (6’ seuil + 4’ allure 10 km) avec récup : 2’ entre les 2 blocs + 10’ retour au calme
  • Avec du dénivelé : sur petite pente (5%) : 30’ échauffement + 3 x 8’ seuil avec récup : 2’ marchée rapidement en montant + 10’ retour au calme.

Et le double seuil alors ?

Le double seuil dite « méthode norvégienne » qui revient régulièrement dans les conversations depuis peu de temps. Mise en lumière par les coureurs de fond norvégiens et notamment le champion Jakob Ingebrigtsen, elle consiste à effecteur deux séances proches du seuil dans la même journée.

A réserver aux plus entraînés

Son objectif est de stimuler l’organisme à une haute intensité contrôlée sans accumuler de fatigue métabolique afin d’accumuler du temps de travail à des allures proches du seuil anaérobie tout gardant une récupération suffisante.

Cette méthode est réservée à des coureurs s’entrainant au moins 4 à 5 fois par semaine. On l’a met généralement pour une 1ère fois dans un plan d’entrainement au maximum 5 à 6 semaines de l’objectif.

Exemple 1 : Matin : 5 x 6’ au seuil avec récup 1’ + Soir : 10 x 400 m au seuil avec récup 30’’

Exemple 2 : Matin : 10 km en endurance fondamentale*  + 10 km allure marathon + Soir : 10 x 1000 m au seuil avec récup sur 400 m.

On peut aussi la mixer avec des séances de côtes pour les traileurs.

Exemple : Matin : 4 x 6’ en côte longue (régulière et peu pentue) au seuil +  Soir : 3 x 8’ au seuil sur plat.

Article proposé par William Petit, entraîneur FFA, dans Running Attitude 252.