Méthode norvégienne du ‘double seuil’ : une nouvelle voie pour progresser
Jakob Ingebrigtsen, phénoménal champion de demi-fond a popularisé la méthode dite norvégienne. Le principe : effectuer des doubles séances juste en dessous de son seuil lactique. On vous explique le principe, les avantages et les adaptations possibles.
Aujourd’hui, la grande majorité des plans d’entraînement se base sur l’entraînement polarisé. Cette méthode répartit le volume hebdomadaire en trois zones d’intensité. 80% en zone 1 (endurance fondamentale), 0 à 5% en zone 2 (intensité moyenne) et 15 à 20 % en zone 3 (intensité dure, VMA).
La méthode norvégienne mise au point par Markus Bakken, coureur de niveau international des années 2000 et mise sur le devant de la scène par les exploits du jeune Jakob Ingebrigtsen se base sur une autre répartition des intensités.
Méthode norvégienne, un entraînement pyramidal adapté

Sa matrice, c’est l’entraînement pyramidal. Moins connu (mais pas moins intéressant pour autant !) ce mode d’entraînement répartit le volume comme suit : 75 % en zone 1, 20 % en Zone 2 et 5% en Zone 3, à raison d’une séance de seuil par semaine.
Adapté ici à la sauce norvégienne, la fréquence augmente avec jusqu’à 4 séances au seuil pour les plus entraînés. Dans le même temps, l’intensité baisse un peu, car ces séances se courent toutes à des allures légèrement inférieures au seuil.
Elles seront donc un peu moins traumatisantes au niveau musculaire et tendineux. Chez les adeptes, les mardis et jeudis sont des jours de seuil, en biquotidien, matin et soir. En complément, un entraînement en zone 3 est effectué le samedi avec un effort de haute intensité (sprints en côte par exemple).
Exemple d’une double séance de seuil avec prise de lactate. Matin : 5 x 6’ à 2,5 mmol/L avec 60 secondes de récupération entre chaque block du matin + Soir : 10 x 1 000 mètres à 3,5 mmol/L avec 60 secondes d’entraînement.
Améliorer le seuil anaérobie

Le but de la méthode est se concentrer sur l’amélioration du seuil anaérobie. C’est le rythme ou niveau d’effort maximum que l’on peut maintenir avant de franchir le seuil et d’accumuler considérablement plus de fatigue. Pour faire simple, cela permet d’augmenter le pourcentage de VMA que l’on utilise à une allure donnée, et donc d’augmenter le temps passé a cette allure.
Cette zone 2 est la zone cible pour les entraînements clés, qui nécessite d’effectuer des intervalles égaux ou légèrement inférieurs à votre seuil anaérobie ou seuil de lactate.
Idéalement, les athlètes prennent des mesures de lactate au moyen d’un petit appareil (le lactatomètre) pour vérifier qu’ils travaillent bien à l’intensité appropriée, autour d’un lactate sanguin de 3,0 mmol/L. Ces séances se courent en intervalles (fractionnés) plutôt qu’à tempo continu.
Les seuils, qu’est-ce que c’est ?

Le seuil aérobie, c’est le moment où votre corps passe d’un métabolisme aérobie à un mélange de métabolisme aérobie et anaérobie, éliminant le lactate à un rythme plus lent en raison de l’intensité accrue. En dessous de ce seuil se trouvent vos zones d’entraînement faciles.
Pour la plupart des athlètes, le seuil aérobie se produit à un niveau de lactate d’environ 2 mmol, soit 80 % de la fréquence cardiaque maximale (FCmax).
Et le seuil anaérobie est le moment que vous produisez du lactate à un rythme insoutenable. Juste en dessous de ce seuil anaérobie se trouve l’intensité que vous pouvez maintenir pendant environ une heure, voire plus pour les athlètes d’endurance bien entraînés.
Pour la plupart des coureurs, ce seuil se situe autour de 4 mmol, soit 87 % de la FCmax. Mais encore une fois, ces chiffres peuvent varier d’un athlète à l’autre.
En quoi le double seuil fait progresser ?

Premier argument, vérifié auprès des athlètes que nous entraînons depuis des saisons, le risque de blessure est moindre qu’avec la traditionnelle méthode polarisée. Dès que l’on allonge les distances, en vue de préparer un marathon par exemple, le seuil devient primordial. C’est le pourcentage de VMA que l’on tient dans le temps qui est important.
Ensuite, parce que sortir de sa zone de confort, c’est redéfinir ses limites, et créer un environnement propice à la progression. Cette méthode norvégienne, avec son approche non conventionnelle peut réveiller corps et esprit en vue d’atteindre de nouveaux sommets. La routine étant l’ennemi numéro 1, essayer de nouvelles techniques, élargir son répertoire, devenir plus polyvalent est forcément pertinent.
Bien sûr, il faut garder à l’esprit que tout le monde est différent et que l’adaptation est essentielle. En tout cas, cette méthode peut vous servir de base, à ajuster en fonction de votre propre contexte, toujours en écoutant vos sensations, vos possibilités et vos envies.
Comment adopter la méthode norvégienne ?

A défaut d’avoir un appareil de prise de lactate, on peut se fier à trois repères simples pour calibrer l’intensité d’un exercice : la fréquence cardiaque, la puissance ou taux d’effort perçu (RPE), et la vitesse au seuil.
Comment savoir si l’on court aux seuils ? |
Le seuil aérobie se produit généralement autour de 78 à 80 % de FCmax et le seuil Anaerobie à environ 87 à 90 % de Fcmax, mesures prises par votre montre cardio-GPS. |
On peut tenir sa vitesse au seuil pendant environ 1 heure, mais pour l’estimer facilement un test de 20’ où l’on va aller le plus vite possible sera un repère fiable. Votre vitesse au seuil sera 95% de votre vitesse de ce même test.Exemple : 5000 m en 20’ = 15km/h, soit une vitesse au seuil de 95% de 15km/h, soit 14,40km/h. |
C’est la mesure la plus simple et la moins chère. Il suffit de se poser cette question : « À quel point travaillez-vous dur ? » Sur une échelle de 1 à 10, le seuil aérobie correspond à un RPE de 3 à 4 pour la plupart des athlètes, tandis que le seuil anaérobie est beaucoup plus difficile, avec un RPE de 6 à 7. |
Testez une version « light »
En vous calibrant ainsi, vous pourrez appliquer cet entraînement basé sur un volume élevé et de faible intensité. Toutefois, nous vous conseillons de ne pas vous lancer pas dans cette voie si vous ne courrez pas déjà 4 voire 5 séances par semaine. Commencez surtout en douceur, en testant une version light aménagée.
Vous pouvez par exemple faire qu’une séance de double seuil par semaine au lieu des deux prônées, pourquoi pas une semaine sur deux, avec des volumes plus réduits. Ces aménagements vous permettant de ne pas prendre de risque, et de respecter le principe de progressivité, la base de la progression.
Exemple d’une semaine « à la norvégienne » en 5 séances
Lundi : 60’ en Zone 1 – Mardi : Matin : 5 x 5’ en zone 2 (avec 1’ de récupération entre les répétition – Soir : 12 x 400 mètres en zone 2 (avec 30’’ de récupération entre les répétitions) – Mercredi : Repos – Jeudi Matin : 60’ en zone 1 (ou repos) – Vendredi : 20 x 30’’ en côtes (zone 3, avec récup la descente – Samedi : Repos – Dimanche : 90’ à 120’ en zone 1