Hyperhydratation : et si je buvais trop ?
L’hydratation, c’est un juste équilibre entre l’eau et le sel de notre corps. Ne pas respecter cet équilibre lors des efforts sportifs lons peut être à l’origine d’une situation rare mais fatale, l’hyponatrémie. Le point sur ce phénomène d’hyperhydratation.
L’hydratation est primordiale dans les efforts d’endurance. En transpirant, on perd entre 0,5 à 2 litres par heure. Boire c’est essentiel, mais ne pas trop boire c’est encore mieux pour éviter un phénomène dont on parle peu, l’hyper-hydratation responsable d’une hyponatrémie. Saviez-vous en effet que l’incidence de l’hyponatrémie est de 18% dans des triathlons, 28 % dans des marathons, 50% lors d’épreuves cyclistes longues et de 30%-50% dans des trails de 162 km (100 Miles) ?
Boire trop d’eau, c’est dangereux
Un spécialiste de la question, le Docteur Patrick Basset, médecin anesthésiste réanimateur et directeur médical de très nombreuses courses dont le Marathon de Paris ou encore l’UTMB nous explique : « L’hyperhydratation consiste à consommer de l’eau au-delà des besoins du sportif à l’effort. Les conséquences qu’elle entraîne sont dangereuses et en particulier l’hyponatrémie. Il s’agit d’une baisse du taux de sodium sanguin à l’effort, conséquence de l’hyperhydratation. Il y a alors un déséquilibre qui se créé entre le milieu extracellulaire et le milieu intracellulaire. Cela peut entraîner des problèmes de santé graves par une rétention d’eau dans les cellules et qui peut aller jusqu’au décès notamment par gonflement du cerveau »
C’est quoi l’hyperhydratation ou hyponatrémie ?

Pour comprendre cette pathologie, il faut savoir que notre organisme est capable de réguler la quantité d’eau présente en permanence avec cependant un léger décalage temporel. Aussi au repos, tout excès d’eau qui va provoquer une légère baisse du taux de sodium dans le sang va alors déclencher les signaux pour éliminer l’eau sous forme d’urine.
Alors qu’en cas de manque d’eau, la soif apparait. C’est surtout le sodium qui joue un rôle fondamental dans la régulation et la répartition de l’eau dans l’organisme. Il existe deux compartiments : celui en dehors de toutes nos cellules ; on l’appelle le liquide extracellulaire, et celui dans nos cellules, le liquide intracellulaire.
Si le liquide extracellulaire est trop important, les cellules vont absorber de l’eau pour rétablir l’équilibre. Cela va alors provoquer un œdème cellulaire qui, au niveau du cerveau rend l’hyper-hydratation et l’hyponatrémie potentiellement fatales.
Comment se manifeste l’hyperhydratation ?
Les signaux sont variés, souvent accompagnés d’un décalage avec l’ingestion de grande quantité de boisson. On peut observer des maux de tête, des céphalées, des nausées, des vomissements, des vertiges ou encore des troubles du comportement.
La personne peut aussi sembler désorientée, confuse, soudainement très fatiguée. En cas d’hyponatrémie sévère, il peut y avoir un coma et un décès. Mais l’hyponatrémie peut aussi être présente d’un point de vue biologique sans symptômes visibles.
Plusieurs mécanismes sont impliqués mais celui qui fait consensus, c’est le fait de boire beaucoup, de boire rapidement et surtout beaucoup plus que nécessaire.
Quels sont les sportifs les plus à risque ?

Ce phénomène peut concerner ceux qui pratiquent des compétitions d’endurance d’une durée supérieure à 2 heures (marathons, ultra-trails, triathlons). Ceux qui se ravitaillent beaucoup, rapidement, trop fréquemment (par exemple tous les kilomètres) et sans apport salé. Tout comme ceux qui, peu expérimentés, pensent que le fait de transpirer doit être compensé par un grand apport d’eau.
Les sportifs de petits poids sont également concernés car pour le même apport de boisson, leur volume de dilution corporelle est plus faible. Les femmes aussi, car il semblerait que la rétention d’eau pourrait être liée à une composition hormonale féminine différente. Citons aussi ceux qui utilisent des anti-inflammatoires non stéroïdiens (aspirine, ibuprofène, kétoprofène) mais aussi des neuroleptiques, et enfin, ceux qui pratiquent en environnement chaud et humide car ils ont alors tendance à boire beaucoup plus.
Comment savoir si je bois assez ?

Bonne question car on a souvent tendance à croire qu’on ne boit pas assez. Dans les excès d’hydratation, on retrouve des boissons comme l’eau libre qui ne contient pas de sodium. Mais aussi toutes les boissons dites de l’effort ou isotonique car, si elles contiennent du sodium, la quantité est au final 5 à 6 fois moins importante que dans le sang.
En réalité les seules boissons riches en sel et non dangereuses pour l’organisme sont les soupes, dont les soupes à base de cube de bouillon instantané. Attention également à l’excès de boisson la veille d’une compétition, car ce pré-remplissage exagéré peut conduire aux mêmes résultats d’hyperhydratation.
Alors comment savoir si on est assez hydraté ? L’idéal serait de se peser avant un effort de longue durée. En effet, pendant l’activité physique une perte de poids est incontournable à cause de la transpiration et des pertes hydriques. On peut ainsi connaître son taux de transpiration horaire approximatif afin d’adapter en fonction les quantités à boire en se pesant avant et après un entraînement, en soustrayant bien sûr les quantités de boissons absorbées.
Boire à sa soif, c’est la bonne stratégie
Plus simplement, les scientifiques recommandent désormais de boire à sa soif, ni trop ni trop peu, et de saler à son goût. Il ne faut donc pas boire obligatoirement à tous les ravitaillements, surtout s’ils sont rapprochés. Il convient d’adapter son hydratation aux conditions environnementales.
La quantité de boisson conseillée est de 400 à 800 ml par heure mais c’est variable selon chaque individu. Sur un ultra-trail par exemple, on préférera boire une soupe à base de bouillon cube hypertonique en alternance avec une boisson isotonique contenant de 0,5 à 0,7 g de sodium par litre de boisson ou de l’eau libre. Une dans chaque flasque par exemple. Ne buvez pas au-delà de la sensation de soif, il vaut mieux accepter d’être un peu en retard d’hydratation que trop en avance.
Les pastilles de sels sont à éviter ! Elles ne sont pas absorbées facilement et risquent de créer des troubles digestifs, des vomissements car elles sont trop concentrées en sodium. Elles n’envoient pas le bon message au cerveau pour la régulation du sodium dans le corps et peuvent de provoquer un réflexe alors de surhydratation.