Yohan Durand : « J’ai la forme comme jamais ! »
Yohan Durand, l’homme fort du moment, a battu tous ses records cette année. Sur le dernier Marathon de Paris, il a terminé premier français, avec un chrono canon en 2h09’21 ». Une belle revanche après des années difficiles…

Sur 10 km, semi et marathon, vous avez cumulé les records cette année !
« Oui, c’est une année plutôt cool ! Sur marathon, j’avais battu mon record à Milan au printemps en 2h12min, puis j’ai fait mieux à Paris en octobre en 2h09min21s. Sur semi, j’ai battu mon record en 1h03min18s et sur 10 km aussi en 28min32s, pendant ma préparation marathon. Cela me fait donc 4 nouveaux records persos cette année. »
Qu’est-ce qui a fait la différence en 2021 ?
« C’est un peu lié à mon histoire. Je fais du haut-niveau depuis quinze ans. En 2018, suite à des douleurs récurrentes aux tendons d’Achille, j’ai décidé de me faire opérer. Cela a été une opération assez lourde puisqu’on m’a raboté l’os et fait un peignage du tendon. Cela m’a tenu éloigné des terrains pendant un an. Je revenais à un niveau correct en 2020 mais il y a eu le COVID et des mois sans compétitions. Cette année, je surfe sur le fait de ne plus avoir de douleurs au quotidien. Et j’ai la forme comme jamais ! »
Yohan Durand en bref. 36 ans, membre de l’équipe de France d’Athlé, licencié au Bergerac Athlétique Club, ambassadeur Asics, sponsorisé par Irun. Ses records : 3min38s12s sur 1500 m, 7min44s46 sur 3000 m, 13min17s90, 28min32s sur 10 km, 1h03min17s au semi, 2h09min21s sur marathon.
Comme quoi, on peut revenir plus fort après une blessure…
« Aujourd’hui, j’ai bien tourné la page de la blessure. J’ai l’impression d’être tout neuf et de repartir comme si j’avais quinze ans. Mais cela a été une question de patience. J’ai d’abord passé cinq mois sans courir, puis j’ai mis cinq mois pour revenir à un niveau correct. Au bout d’un an, j’avais retrouvé un bon niveau national, mais en deçà des standards pour battre mes records. Il a fallu ensuite un an de plus avec le Covid ».
Yohan Durand, à Paris, vous avez terminé premier français en 2h09min. Votre histoire avec le Marathon de Paris n’est pas terminée… On vous y reverra peut-être en avril ?
« Je pense bien sûr recourir le Marathon de Paris mais ce ne sera sans doute en 2022. Je prépare les championnats d’Europe de marathon qui seront à Munich au mois d’août prochain. Enchaîner deux marathons en avril et en août, cela risque d’être trop rapproché. »
Quel sera votre objectif sur les championnats d’Europe à Munich ?
« J’irai chercher une médaille en individuel. Avec mon chrono en 2h09min, je suis le 8e performer européen de la saison. Je peux prétendre à un top 10 à Munich. Il y aura aussi une médaille collective à aller chercher avec l’équipe de France de marathon. »
Avec Medhi Frère, Morhad Amdouni, Nicolas Navarro notamment, nous avons une belle génération de coureurs. Le record de France sur marathon de Benoît Z (2h06min36s, 2003) pourrait être battu prochainement ?
« J’ai terminé en 2h09min21s le Marathon de Paris qui n’est pas le plus roulant des marathons internationaux. A Valence en Espagne ou à Berlin en Allemagne, on sait qu’il faut enlever 30 secondes environ au chrono. Mon objectif, c’est de courir en 2h08min30s à court terme. Mais 2h06min, c’est un autre monde. Pour l’instant je ne m’en estime pas capable. »
Yohan Durand, vous avez les J.O de Paris 2024 dans le viseur ?
« Oui, clairement. Lorsque la période de qualification s’ouvrira en 2023, j’espère me rapprocher des 2h08min. C’est mon vrai objectif. Au-delà du chrono, ce que je vise c’est de me qualifier pour les prochains J.O. »
Comme beaucoup d’athlètes, vous avez démarré sur la piste…
« Oui et j’avais d’ailleurs des bons résultats. Mais en 2015, j’ai fait le choix de tourner le dos à la piste. J’allais avoir 30 ans, je me suis dit que c’était le moment de basculer sur marathon. C’est une distance d’expérience, j’ai voulu y monter assez tôt. Beaucoup m’ont dit que c’était peut-être une erreur car j’avais un potentiel intéressant sur la piste mais je ne le regrette pas. »
Quel est le secret d’un athlète complet ?
« Il faut bien planifier sa saison et ses objectifs. Et surtout, il faut s’entraîner sur une palette un peu large. Par exemple, je n’ai pas négligé le travail de vitesse sur 10 km même en préparation marathon. C’est ce qui m’a permis de battre mon record au 10 km, à Langueux sur le Championnat de France. Travailler sur des allures rapides sans négliger les sorties longues, c’est important. Il faut juste trouver le juste dosage, ce que j’ai réussi à faire cette année. »
Quels seront vos prochains dossards ?
« Je ferai des cross cet hiver, histoire de changer de rythme, d’appuis, de travailler une autre foulée, toute en relance pour retrouver du dynamisme. Je vais aussi garder un pied sur la route. Je courrais la Corrida de Houilles, puis les 10 km de Valence en visant un gros chrono. Ensuite, je prévois le Semi de Lisbonne en mars. »
Yohan Durand, quels conseils donner à ceux qui visent un objectif sur marathon ?
« Garder des distances courtes, ne pas négliger la vitesse pour débrider le moteur et changer de rythme, c’est important. Courir vite, cela fait toujours du bien, même en préparation marathon ! »
Et pour éviter de frapper le mur ?
« Le jour J, il faut vraiment respecter ses allures et être le plus régulier possible. Démarrer en surrégime c’est risquer de frapper le mur. La base aussi, c’est de bien s’hydrater et s’alimenter en ne ratant aucun ravitaillement. »
Concernant les paires en carbone, vous étiez un peu sceptique au départ. Désormais, vous courez en ASICS Metaspeed. Vous êtes convenu ?
« Au début je m’interrogeais un peu sur cette « course à l’armement » avec toutes ces plaques de carbone. Aujourd’hui il y a une réglementation, avec une hauteur de semelle définie et une seule plaque de carbone autorisée. Ces chaussures ont une telle absorption des chocs et un tel amorti que la dégradation musculaire se fait plus tard. Cela permet de courir plus vite car la mousse absorbe énormément les chocs et la plaque de carbone renvoie l’énergie d’elle-même, du coup on a une économie de course très importante. Sur marathon, j’estime qu’il y a un gain de temps de deux minutes, soit 3 secondes au kilomètre environ par rapport à ma foulée et ma vitesse. »
A quoi ressemble le quotidien d’un athlète professionnel ?
Je fais entre 12 et 16 semaines de préparation marathon. Je tourne alors entre 140 et 180 kilomètres par semaine en 10 ou 12 entraînements en course à pied. J’ajoute du vélo et de la natation pour protéger mes muscles et articulations. Hors préparation marathon, je tourne à 140 kilomètres par semaine. En parallèle, je veille à avoir un bon cycle de sommeil avec 9 heures par nuit et une sieste l’après-midi. La récupération est primordiale, l’alimentation et l’hygiène de vie aussi. Il ne suffit pas de courir, il faut aussi faire en sorte que son corps assimile au mieux l’entraînement. »