Un couple six étoiles

Le couple Dauge fait partie des 350 Français à détenir la médaille "six stars finishers" remise à ceux qui terminent les six marathons majeurs.

Claude et Elisabeth Dauge détiennent une médaille très convoitée des marathoniens, celle des six stars finishers. Le couple de Franciliens a réalisé un rêve en bouclant les six plus gros marathons de la planète. Et courir ainsi a changé leur vie.

Six courses, six étoiles, un rêve pour Claude et Elisabeth Dauge. Ces Franciliens font partie d’un club très fermé, celui des « six stars finishers ». En février au Japon, le couple de cinquantenaires a décroché sa sixième étoile en bouclant la série des Abbott World Marathon Majors (Boston, Londres, Berlin, Chicago, New York et Tokyo). En France, 350 marathoniens seulement possèdent cette « big medal ». Pour les Dauge, cette récompense est un bel accomplissement.

Claude et Elisabeth Dauge font partie des 350 Français à posséder la médaille des 'six stars finishers'.

Courir, d’abord pour maigrir

Des deux, c’est monsieur qui s’est mis à courir en premier. Conducteur de bus de nuit, les années passant, ce père de famille s’était un peu laissé aller. A plus de 100 kilos sur la balance, Claude a chaussé des baskets sans autre ambition que de maigrir.

Rapidement, la course équilibre son quotidien et le métamorphose. Aujourd’hui jeune retraité, il affiche un poids de forme autour de 64 kilos et une pêche d’enfer pour un presque sexagénaire. Mais rien n’a été facile. « Le tour du parc de l’île Marante, à côté de chez nous, fait 4 kilomètres. J’ai commencé par marcher, puis alterner marche et course, pour finir par courir d’une traite. Je me suis inscrit sur mon premier marathon à Paris en 2001. »

« A l’époque, je pesais encore près de 100 kilos. J’en ai bavé, j’ai fini au mental en 5h. J’ai réalisé que cette distance était insurmontable pour personne. Avec de la volonté et un bon entraînement, tout le monde peut boucler un marathon. J’en suis la preuve ! Comme je maigrissais bien, je me suis pris au jeu des marathons, histoire d’aller plus loin. En club, j’ai rapidement progressé », raconte l’ancien chauffeur.

Son record : 3h07’ (Dublin, 2005) en 25 marathons comptant donc les Majors. « Courir les six majeurs, c’était plutôt le rêve de ma femme. Moi je voyais plus le côté pécuniaire de la chose. Mais je dois dire que j’ai adoré courir ces marathons, tout particulièrement aux Etats-Unis. A Boston, Chicago et New York, le public est extraordinaire et l’ambiance comme nulle part ailleurs. » détaille Claude.

Premier marathon : « le plus beau jour de ma vie« 

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Le couple Dauge à l’arrivée du Marathon de Londres.

Sa femme Elisabeth lui a donc emboîté le pas une dizaine d’années plus tard. Allergique au sport à la base, cette employée de banque s’est aussi reprise en main à l’aube de la cinquantaine. « J’étais une grosse fumeuse, environ deux paquets par jour. J’ai eu un souci de santé avec des artères bouchées. J’ai donc arrêté de fumer et nécessairement, j’ai pris du poids. J’ai commencé à trottiner tranquillement, sans aucun esprit de compétition, juste pour perdre du poids. Je voyais mon mari enchaîner les marathons et j’avais bien un rêve secret, courir New York, mais cela me paraissait tout simplement impossible….

« Et puis j’ai eu un déclic lorsque qu’une amie a terminé un marathon en 6h. Je me suis dit, si elle l’a fait, pourquoi je n’en serais pas capable ? Cette amie m’a proposée de l’accompagner à Paris en 2016. Je n’oublierai jamais l’émotion qui m’a traversée en passant la ligne d’arrivée de mon premier marathon. Après la naissance de ma fille, ce fut le plus beau jour de ma vie ! J’étais fière d’accomplir ce challenge toute seule, en dépassant la souffrance. Du haut de mon mètre cinquante six et de mes cinquante six kilos, je n’ai pas vraiment le profil type de la coureuse mais j’y suis arrivée ! » détaille Elisabeth.

Six stars finishers, un graal

Le couple Dauge, sur le Marathon de New York en 2017.
Le couple Dauge, sur le Marathon de New York en 2017.

Le couple réserve son voyage pour New York l’année suivante, en 2017. « Très vite, j’ai eu envie de cette grosse médaille à six étoiles, c’était mon graal. », raconte Elisabeth, désormais aussi mordu que son époux.  

Ensemble, chacun à son rythme, ils ont donc couru Chicago en 2018, Londres et Berlin en 2019, Boston en 2022, pour finir par Tokyo cette année. Elisabeth boucle ce dernier de la série, son 9e marathon, sur un « RP » en 4h08’, une belle surprise. «Je ne partais pas spécialement pour battre mon record. Au pied des grandes immeubles de Tokyo, mon GPS captait mal, je ne savais pas vraiment à quelle allure je courrais. Le contexte n’était pas très favorable, car à cause du Covid, les ravitaillements étaient compliqués, nous devions repérer les tables en fonction de notre numéro de dossard, puis aller chercher nous-même les verres d’eau. Bref, malgré cela, à 5 kilomètres de la fin, je réalise que je peux battre mon record, cela m’a boosté pour terminer ! » raconte la mère de famille, pas prête de s’arrêter en si bon chemin…

« Courir, c’est mon Prozac »

« Initialement, je m’étais dit que j’arrêterai après avoir couru ces six marathons majeurs. A 57 ans, le corps commence à fatiguer et avec le travail, l’entraînement est parfois pesant. Mais bon, maintenant je prévois de continuer. Courir, c’est mon Prozac et j’adore la distance marathon. Si j’ai la chance d’être sélectionnée pour le Marathon pour Tous, j’irai évidemment pour ne pas rater cet événement historique. Mais j’ai aussi dans un coin de ma tête, le Marathon des Big Five en Afrique du Sud qui se court au milieu des animaux, ou encore le Marathon de Washington DC, en soutien aux vétérans américains. »

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Elisabeth Dauge, fan de la mascotte du Marathon de Boston.
Souvenir avec la mascotte du marathon de Boston.

De son côté, son mari compte aussi bien sûr continuer le plus longtemps possible à se challenger. « Je me suis focalisé sur les marathons pendant des années, en enchaînant parfois 3 ou 4 en une année. Si c’était à refaire, je m’entraînerais différemment, en privilégiant la qualité à la quantité. Cela m’aurait sans doute permis de passer sous les 3h. C’est mon seul regret. Mais à l’époque, on faisait tous beaucoup de volume, maintenant c’est différent. Cette année, je veux justement essayer de regagner en vitesse. J’aimerai revenir à 41’ ou 42’ sur 10 km (ndrl : son record est en 39’) » raconte le coureur de Nanterre.

Car en bon compétiteur, Claude joue volontiers des coudes en compétition comme à l’entraînement. Le duo fait partie de la grande communauté Adidas Runners Paris et partage régulièrement des sorties groupées à plusieurs dizaines de coureurs de tous âges et tous niveaux. Claude tient parfois la dragée haute à plus jeune que lui, et aime se « rentrer dedans » comme on dit dans le jargon.

La collection de médailles promet donc de s’étaler encore un peu plus dans le salon. Pourquoi pas d’ailleurs en courant le futur petit nouveau du circuit Abbott World Marathon Majors. Pour l’heure Sydney en Australie, Capetown en Afrique du Sud et Chengdu en Chine sont candidats. On devrait connaître d’ici l’an prochain la destination élue. Reste à savoir si une nouvelle « big medal » arborera sept étoiles…