Michel Armandy : 2h45 au marathon à 58 ans
Michel Armandy fait partie des meilleurs marathoniens mondiaux dans sa catégorie. A Valence, en décembre prochain, ce coach sportif installé dans les Bouches-du-Rhône compte bien battre son record en 2h45’. Un bel exemple à suivre.
Plus il vieillit, plus il est rapide Michel Armandy. A l’aube de la soixantaine, ce coach inspirant a gagné trois minutes sur son chrono au marathon datant de quinze ans auparavant.
Jugez plutôt ses chronos : 2h48’ en 2007, nouvelle marque en 2h54’ en 2018, 2h46’ en 2021. 2022 sera sa meilleure année, avec un nouveau cap passé en 2h45’ à 58 ans. C’était à Berlin et deux mois plus tard, il réitérait la performance au marathon de Valence en 2h47’ cette fois.
En décembre prochain, il retournera sur ce même marathon espagnol roulant (son favori) pour grappiller encore quelques secondes à ce chrono record de haute volée. Son objectif : monter sur le podium de ce marathon international, sans conteste le plus dense au monde.
Repartir à la guerre
La fameuse « décadence liée à l’âge » dont parlent les scientifiques – estimée entre 8 et 12% par décennie à partir de 40 ans – ? Michel ne connaît pas. Et s’ingénie à conserver une belle fraîcheur d’esprit. « J’oublie mon âge, je me dis que je dois encore progresser. J’y crois encore sincèrement, cela me motive au quotidien pour m’entrainer et m’inscrire sur des courses », assure le passionné à l’accent chantant.
Avec ce « RP » tout frais et 85 marathons au compteur en trente ans de pratique, son expérience parle pour lui. De quoi surmotiver les sportifs qu’il entraîne via sa structure, la Run Academy, comme ceux qui le suivent sur sa récente chaîne Youtube.
« J’encadre majoritairement des sportifs dans la tranche d’âge 40-50 ans. C’est génial de réussir à remobiliser des coureurs qui avaient lâché l’affaire, pensant que leurs meilleures années sportives étaient derrière eux. J’adore les faire repartir à la guerre en me servant de mon exemple, et cela fonctionne », explique le coach, fier de dire que sur les centaines de sportifs suivis depuis dix ans, 80% ont battu leur record personnel, gagnant en moyenne entre 10 et 30 minutes sur leur chrono sur marathon.
Michel Armandy, la course dans la peau
Un cas à part, Michel ? Assurément mais un bel exemple à suivre. La course, c’est (presque) toute sa vie. D’abord l’athlétisme, avec une découverte en classe de 5eme – pour courir après sa petite copine de l’époque – et jusqu’à ses 20 ans. Il poursuit ensuite la cavale « hors stade » à un moment où le running se démocratise peu à peu. Dans le milieu, il ne passe pas inaperçu. Poussman, de son surnom.
Le père de famille baladait alors sa troisième et dernière fille en poussette sur ses entraînements comme ses compétitions. « Je l’avais commandée aux Etats-Unis car à l’époque, il n’existe pas de modèle de poussette pour les coureurs en France. Ma fille s’est régalée à m’accompagner de ses 1 ans à ses 3 ans – elle en a 22 aujourd’hui – et moi avec elle. J’étais alors un bon athlète de niveau départemental, mais sans plus. Puis partir de 40 ans, j’ai commencé à faire des podiums sur les courses locales. J’ai couru les marathons pour performer jusqu’en 2007, l’année de mes 43 ans. Je courais à l’époque environ 4 marathons par an. Un pour la performance, les autres pour le plaisir de voyager en Europe en compagnie de ma femme, également marathonienne », raconte le coureur.
Bloqué sur 15km/h
Son record était alors de 2h48’. Un plafond de verre… « J’étais persuadé que je ne pourrais pas aller plus vite. Un peu comme si mon compteur était bloqué sur 15km/h. Du coup, j’ai arrêté de courir après le chrono sur marathon et j’ai basculé sur le triathlon. »
Très vite, il coche la case Ironman, bouclant cinq triathlons XL entre 2007 et 2012. Encore une fois avec des chronos honorables, un record en 9h53’ mais une faiblesse, la natation. « Je me rattrapais ensuite, sur la partie vélo, mais surtout, sur la course à pied, bouclant les marathons entre 3h15 et 3h25’ », raconte le triathlète de Bouc-bel-Air.
En 2011, le décès de son père l’éloigne un peu de la compétition. Puis trois ans plus tard, Michel, jusqu’à alors acheteur pour la grande distribution est licencié pour raisons économiques. Il rebondit alors en se lançant dans le coaching, qu’il a toujours pratiqué autour de lui, par du goût du partage. Sa Run Academy se fait vite connaître en région PACA et au-delà.
Bien sûr, pas de secret, pour arriver ces résultats, cette « locomotive » s’entraîne fort. Lorsqu’il avait un job un plein temps, Michel tournait à 70 kilomètres par semaine. Désormais, il avale le double au plus fort de sa préparation marathon, ayant plus de souplesse pour gérer son emploi du temps au quotidien.
On se met trop de barrières…
Borner est une chose, mais cela ne fait pas tout, loin de là. L’aspect psychologique est primordial assure le coach. « On se met trop de barrières dans la vie. Si votre cerveau y croit, il n’y a aucune raison pour que vous n’y arriviez pas. Sauf si vous avez été un champion de très haut niveau à 20 ans, rien ne vous empêche de performer après 40 ou 50 ans. Il faut simplement être patient et s’entrainer intelligemment. Si vous reprenez la course par exemple après une longue pause, oubliez ce que vous avez été pour ne pas se tirer vers le haut, ni vers le bas. »
Autre conseil de coach : mettre l’accent sur le renforcement musculaire les années passant pour éviter les blessures, et soigner tout particulièrement son alimentation en évitant les graisses et en privilégiant les protéines.
Eloge de la lenteur
Côté entraînement, sa recette « miracle », c’est de courir lentement. Oui, lentement. « Beaucoup de coureurs de tous âges d’ailleurs s’entraînent trop souvent trop vite. Il ne faut pas faire plus de deux séances de qualité (fractionné, seuil) par semaine. Regardez le champion Nicolas Navarr, que j’ai eu la chance de côtoyer par le passé. Il court le marathon à 20km/heure mais il effectue les trois quarts de ses footings à 12 km/h ! » se plaît-il à répéter.
Son atout le plus précieux ? L’expérience acquise au fil des années. « Maintenant par exemple, je suis capable de courir le deuxième semi de mes marathons exactement à la même allure que le premier, à quelques secondes près. Et la régularité sur marathon, on le sait, c’est une stratégie payante. Ne pas se griller sur les premiers 21 kilomètres, cela s’apprend avec l’expérience. L’âge n’est pas une fatalité, au contraire. Toutes les barrières liées à l’âge sont en train de tomber. Regardez Kipchoge, au top à près de 40 ans ! ». Le meilleur resterait donc à venir ? On se plait à y croire derrière Michel Armandy.