Charly Bancarel, finisher du Marathon de Paris à 93 ans
Figure de la course à pied depuis des décennies, Charly Bancarel, 93 ans, a terminé le Marathon de Paris en 7h22′? En 2024, ce papy fringuant réalisera un rêve en courant le marathon des Jeux Olympiques.
On ne s’arrête pas quand on vieillit, mais on vieillit quand on s’arrête. C’est le dicton favori de Charly Bancarel, 93 ans. Une frêle silhouette mais une santé de fer pour ce super papy qui vit depuis toujours à Salers, dans le Cantal. « Pour l’instant, je touche du bois, je n’ai jamais été blessé et j’ai terminé tout ce que j’ai entrepris », lance-t-il de sa voie éraillée.
Objectif : finisher à Paris
Ce doyen de la course à pied a couru ce dimanche le Marathon de Paris pour la dixième fois. « Mon objectif c’est d’abord de terminer bien sûr. Autour de 5h-5h15, si j’y arrive, en fonction de ma forme. En 2019, j’avais mis 5h23’. J’étais bien à l’arrivée, j’avais même regretté de ne pas avoir forcé un peu plus, mais enfin, que voulez-vous à mon âge, on fait attention… », nous expliquait-il il y a quelques semaines. Finalement, Charly a mis plus de temps que prévu pour boucler cette traversée de Paris. Il termine en 7h22, sous les ovations du public.
Cet homme est fait d’un autre bois que vous et moi. Aligner 42 kilomètres à son âge tient tout simplement de l’exploit. « Malgré les années qui passent, j’ai toujours le cœur pour faire ces choses-là, c’est une chance. Je sens que c’est bien pour mon corps et mon médecin ne dit pas le contraire », explique ce grand-père qui fait la fierté de toute sa famille. Ses bilans de santé réguliers en attestent. Tension, articulation, cholestérol, tout est au vert. Il faut dire que cet ancien hôtelier suit une hygiène de vie irréprochable.
A Salers, ses enfants et petits-enfants tiennent désormais Le Bailliage, l’hôtel-restaurant qu’il a bâtit en 1980, ainsi qu’un bar voisin. Mais les bons plats auvergnats, bien roboratifs, c’est pour les clients. Charly Bancarel lui raffole plutôt des crudités, bien meilleures pour la santé.
De la course, du vélo et du renforcement
Et il s’entretient au quotidien. Sa silhouette foulant les routes du coin de bon matin fait partie du paysage. « Je me lève tous les matins vers 6h30. Je sors m’entraîner à l’extérieur, sauf s’il pleut à verse ou qu’il fait très froid. Dans ce cas, je fais tourner les jambes sur mon vélo d’appartement. Et puis j’enchaîne avec quelques exercices avec mes haltères de 8 kilos et je fais des étirements pour garder la souplesse, c’est important », détaille le retraité bien occupé.
Depuis des années, sa vie sportive est consignée dans des carnets, soigneusement conservés. « Tenez, par exemple en 2016, j’avais fait 1000 kilomètres de course à pied et 3700 kilomètres de vélo. Une bonne année. Depuis, j’ai réduit la voilure, je trottine toujours bien sûr mais je tourne autour de 600 kilomètres en courant par an » commente-t-il en feuilletant les pages au hasard.
C’est le directeur de La Pastourelle, trail phare de son pays qui l’a convertit. « J’ai été vice-président pendant plusieurs années. Mon camarade directeur m’a dit un jour, puisque que tu es dans l’organisation, viens donc t’entraîner avec nous. C’est comme ça que tout a démarré et je ne me suis jamais arrêté. J’ai commencé tard, j’avais alors 55 ans, mais je me rattrape depuis pour mon plus grand plaisir ! »
Un premier marathon à 70 ans pour Charly Bancarel
Conducteur de car pendant des années, il rentrait souvent chez lui en courant, raconte sa femme. Une vingtaine de kilomètres effectués régulièrement après son service. Puis Charly Bancarel s’est offert son premier marathon pour ses 70 printemps. C’était au Médoc. Il s’en souvient comme si c’était hier. « J’ai commencé par le plus festif. Mais moi je ne m’occupais pas de boire du vin aux ravitaillements dans les châteaux, juste de l’eau. J’ai terminé premier vétéran 4 et l’organisation m’avait offert une caisse de 12 bouteilles d’un grand cru du Médoc. »
Ensuite, les marathons se sont enchaînés parmi d’autres compétitions, sur la route comme sur les sentiers. S’il n’a plus le compte exact en tête, Charly évoque une petite trentaine de 42 km à son palmarès, avec un record 4h45. New York en 1998 reste sa plus belle émotion. « L’ambiance prend à la poitrine dès le départ. Imaginez-moi, petit auvergnat, au pied des buildings de Wall Street de 60 étages, sur des avenues larges de dizaines de mètres… je me suis senti si petit… J’avais mis 5h16’ », raconte-t-il, en regardant une photo de lui, les bras levés au ciel dans Central Park.
Le Puy, Marvejols et Dax pour la suite
Après deux années en pointillé liées au Covid, Charly se remet en selle en 2023, sa quatre vingt quatorzième année. La forme est là. L’envie aussi. Au programme pour les prochains mois, sans doute les 15 km du Puy-en-Velay, le 1er mai. Cet été, pourquoi pas Marvejols-Mende, déjà bouclé deux fois.
Ensuite sans doute, un tour sur La Fériascapade de Dax, l’une de ses courses favorites. « Cela fait quinze ans que j’y vais. C’est un 10 km très convivial. A l’arrivée, il y a de bonnes choses, du foie gras des Landes et un bon repas le soir. Pour mes 90 ans l’organisation m’avait offert une magnifique plaque gravée à mon nom ». Ce beau souvenir trône dans la vitrine du salon familial, parmi les coupes et les médailles, exposées par dizaines.
La surprise de Patrick Montel
Mais sa plus belle récompense reste à venir. Car en 2024, Charly Bancarel réalisera un rêve en participant au marathon des Jeux olympiques. Le journaliste Patrick Montel lui a fait une belle surprise après Noël. Il a toqué à sa porte avec André Giroux, président de la Fédération française pour lui remettre un dossard pour le Marathon pour tous. Les larmes de joie de ce petit monsieur filmé pour l’occasion ont fait le tour du web.
« Quand j’ai su que les JO 2024 étaient à Paris et qu’il y aurait un marathon pour tous, j’ai tout de suite voulu participer. J’en avais parlé à Patrick Montel, rencontré sur les 15 km du Puy-en-Velay. Quand il est venu chez moi, je n’y croyais pas. Participer à ce marathon olympique, c’est un honneur pour moi. Pour ma famille, pour mes petits enfants, c’est magnifique » s’enthousiasme le vétéran, ému de cette attention. Porter le dossard 95 serait un joli clin d’œil à ses 95 ans, qu’il fêtera le 12 août 2024, deux jours après l’épreuve.
La chaleur ne lui fait pas peur. Le tracé qui s’annonce bien musclé non plus. « La chaleur, j’aime ça, je roule souvent par 30°C l’été, ça ne me gêne pas, je crains plutôt le froid. Et puis j’ai fait cinq fois Paris-Versailles, alors je connais un peu le secteur vers la Côte des Gardes ». détaille-t-il.
En quarante ans de compétitions, Charly a multiplié les rencontres, suscitant l’admiration d’une génération à l’autre. « Pour moi, c’est toujours un plaisir de courir. On éprouve une telle satisfaction en terminant une course ! Ce marathon en 2024 sera sans doute mon dernier marathon, mais j’espère continuer sur des distances plus courtes tant que je pourrais ». Avec lui, touchons du bois pour cette passion le comble encore durant de belles années.