Apprendre à courir en pleine conscience

Courir simplement, ni contre les autres, ni contre soi-même, mais au contraire pour soi, corps et esprit en harmonie. C’est ce que propose Vincent Toumazou, coureur depuis 47 ans dans son livre. Une philosophie inspirante…  

A toujours vouloir repousser ses limites, on finit par se perdre en chemin. Peut-être en avez-vous fait l’expérience. Vincent Toumazou, court depuis 47 ans. Bientôt 5 décennies d’une passion intacte, avec plus de 115 000 kilomètres dans les jambes. Pendant des années, il a couru après le chrono et les médailles, avant de se consacrer exclusivement aux ultramarathons.

Courir en pleine conscience s’apprend

Il pratique désormais de manière douce, spirituelle et bienveillante, juste pour le plaisir, sans quête de performance. Une approche holistique qu’il partage dans son livre, Courir simplement. « J’ai conçu ce livre comme une boîte à outils, en regroupant les approches qui m’ont nourri. J’invite chacun à composer sa propre pratique, celle qui lui ressemble et lui est agréable. Il y a autant de façon de courir que de coureurs, j’en suis persuadé. Chacun de nous est son meilleur coach ! » commente l’auteur, chargé de mission à la direction du centre spatial de Toulouse et animateur d’un groupe de course adapté aux débutants à Donneville (31).

Ce « slow running » prend le contrepied de ce que nous vous proposons habituellement. Mais performance, bien-être et pur plaisir ne sont pas incompatibles. Plus qu’un sport, la course devient ici une invitation au voyage. Courir en pleine conscience, c’est courir simplement ou simplement courir. C’est revenir aux sources, à l’essentiel, et sans doute aussi se redécouvrir. Vous souhaitez entrer dans une nouvelle dimension de la course à pied ? Que ces conseils vous ouvrent la voie…

1/ Du plaisir, toujours du plaisir    

En premier lieu, lâchez prise. Courir sans forcer ni se forcer, c’est par là qu’il faut commencer. Sans plan d’entraînement, juste avec le plaisir et l’envie chevillés au corps. « Il ne faut pas s’obliger à courir absolument un jour sans motivation. En revanche, en courant, je conseille de se laisser guider uniquement par le plaisir du moment. Si j’ai envie d’aller vite, j’y vais. Si je veux plutôt profiter du paysage, je le fais. Varier ainsi les allures, se jouer du terrain et des trajectoires, c’est prendre la course à pied comme un jeu, comme quand nous étions enfant. Courir ainsi aux sensations permet aussi de retrouver un peu de fraîcheur », explique Vincent Toumazou, qui ponctue, à l’occasion, ses sorties d’exercices méditatifs.

2/ Soigner sa gestuelle  

En endurance, à faible intensité, la quête d’esthétisme dans le geste permet de bien s’ancrer au présent. La foulée doit être furtive, avec une emprunte rapide et dynamique au sol. « Le travail de la gestuelle est particulièrement intéressant, surtout en prenant de l’âge. Se visualiser en train de courir sur un tapis d’œufs par exemple, permet de réduire naturellement son impact sur le sol. On adopte ainsi une foulée légère, sans faire de bruit au sol.

Autre éducatif intéressant, s’imaginer être une marionnette, avec un fil tiré depuis son périnée jusqu’au sommet de son crâne. Conserver cette verticalité en courant permet de gainer sa posture, mais aussi de courir de façon plus déliée et harmonieuse » assure le coureur.

3/ Se reconnecter au présent pour courir en pleine conscience

Courir en pleine conscience, c’est courir ici et maintenant, sans plan, sans application qui vous dicte l’allure ou musique qui fausse vos sensations. En action, pour se reconnecter au moment présent, on peut porter son attention sur son ressenti interne. En prenant par exemple conscience de l’air qui entre et sort de ses poumons, en étant attentif aux signaux que nous renvoie chaque partie du corps, qu’ils soient agréables ou pas. Cette technique de visualisation interne que Vincent a apprise du préparateur mental François Castell lorsqu’il préparait la Badwater (course de 217 km dans la vallée de la Mort aux USA) lui a été particulièrement efficace.

Autre exercice intéressant, la respiration nasale, inspirée cette fois du yoga. « Respirer par le nez de manière lente et contrôlée contraint à être en aérobie, c’est-à-dire en totale aisance respiratoire. Cela requiert une présence dans sa course et beaucoup de relâchement. On peut faire des blocs de 1 à 2 minutes, puis allonger ce temps avec la pratique. »

4/ Courir paysages et émotions  

Chercher à peindre mentalement ce qui nous entoure, c’est se montrer sensible à la beauté du monde. Corps, esprit et paysage en harmonie. « Quand on court on est un peu comme un artiste. C’est ce que j’appelle l’art éphémère. Même en ville où l’environnement n’est pas toujours plaisant, on arrive à faire quelque chose de beau et d’équilibré. Ce sont des œuvres éphémères. Vous en êtes le seul témoin, mais cela vous accompagnera dans votre vie ordinaire. Quand vous aurez un souci, vous saurez faire appel à vos belles parenthèses », détaille Vincent.

Ce tableau rempli d’émotions se compose d’odeurs, de sensations sous les pieds, de la caresse de l’air sur la peau, de l’intensité lumineuse du moment, des bruits environnants. Bien plus riche qu’un selfie sur instagram, non ?